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Appel à des engagements forts d’INRAE pour faire face aux défis des changements globaux
La communauté scientifique internationale a accumulé les connaissances sur l’ampleur des changements planétaires et leurs causes, ainsi que sur la nécessité et les moyens de les atténuer et de s’y adapter. Ces travaux montrent que des transformations majeures de nos modes de vie et de nos organisations sociales et professionnelles sont indispensables à court terme. Ils soulignent aussi fréquemment que l’inertie actuelle de nos sociétés ne provient pas d’un manque de données scientifiques ou de technologies, mais de raisons plus profondes : politiques, économiques, sociales, culturelles et psychologiques.
En 2019, plus de 13000 scientifiques, incluant des agents INRAE, ont signé un article avertissant sur l'urgence climatique, relayé par de nombreuses organisations, villes et parlements. L’Europe, le 28 novembre 2019, est devenue le premier continent à déclarer l’urgence climatique et environnementale. En parallèle, un nombre croissant d’universités et d’initiatives collectives du monde académique alertent sur la nécessité pour les acteurs de la recherche, à tous les niveaux, de repenser les objectifs, thèmes et organisation de la recherche, et les pratiques de travail, face à l’ampleur des transformations sociétales nécessaires.
Le nouvel institut INRAE avec près de 12000 personnes, un des leaders mondiaux en sciences agricoles et alimentaires comme en écologie et environnement, a en effet une responsabilité considérable dans l’impact que la recherche aura dans les années à venir sur cette problématique des changements globaux. L’investissement significatif d’agents INRAE dans des instances du GIEC et de l’IPBES, ainsi que dans des initiatives collectives spontanées telles que
Labos 1.5,
l’Atelier d’Ecologie Politique de Toulouse et d’autres émergeant sur Paris, Lyon, est le signe d’une prise de conscience qui s’élargit.
Une réponse institutionnelle à la hauteur des enjeux est maintenant nécessaire et opportune. INRAE entre dans une phase de définition de ses objectifs pour les prochaines années, et a donc aujourd’hui une occasion unique de définir un plan stratégique à la hauteur des défis mondiaux.
Les signataires de cet appel demandent que cette opportunité soit clairement et fermement saisie pour recentrer les recherches conduites dans l’institut vers ces défis prioritaires et que les modalités de cette recherche soient mises en adéquation avec les nouvelles contraintes qui devraient s’imposer à tous. Nous demandons que l’intelligence collective et la créativité des agents et de la société civile soient mises à contribution dans la définition des nouvelles priorités imposées par l’urgence climatique et écologique, probablement au prix de réorientations de domaines d’activités moins pertinents qui devront alors être accompagnés.
D’autre part, les signataires de cet appel demandent que l’importance et l’urgence de réduire les impacts environnementaux directs des activités scientifiques sur les écosystèmes soient prises en compte par l’institut. Et ce pour plusieurs raisons. Premièrement, comme tous les autres secteurs, les activités scientifiques doivent contribuer aux efforts de réduction rapide de leur empreinte écologique au profit du maintien des activités les plus vitales. Deuxièmement, pour que le message de notre communauté scientifique soit entendu quant aux transformations à engager dans le reste de la société, nous devons faire preuve d’exemplarité dans nos activités et démontrer que nous pouvons appliquer à nous-même ce que nous préconisons pour tous. Réduire les impacts environnementaux des activités d’INRAE implique de modifier significativement certaines de nos façons de travailler. A titre d’exemples, il nous semble urgent de repenser l’incitation aux déplacements internationaux et/ou aériens ; la course en avant dans le numérique est également problématique, du fait de son intensité énergétique.
Ces transformations n’iront pas sans avoir des impacts sur notre confort et nos habitudes, sans introduire des contraintes, sans rencontrer des oppositions. INRAE doit anticiper sur ces aspects et accompagner les agents qui seront concernés, aussi bien que les partenaires que nos transformations impacteront. Mais ces changements représentent aussi des opportunités pour améliorer la qualité de nos productions et nos conditions de travail, ainsi que pour donner davantage de sens à nos métiers et mieux articuler nos activités aux attentes de la société. Autant d’aspects positifs que INRAE devrait mettre en valeur et renforcer. C’est aussi l’opportunité pour INRAE de prendre une place de premier plan parmi les institutions qui s’engagent concrètement dans la lutte contre les changements planétaires et leurs conséquences.
Nous sommes confiants que les instances d’INRAE partagent les mêmes ambitions et inquiétudes. Notre démarche vise à encourager ces instances à prendre des orientations fortes à la hauteur réelle de défis qui sont immenses. Si elles sont claires et expliquées, elles auront, nous en sommes convaincus, le soutien du plus grand nombre.